Récit d’une naissance
Il y a 2 ans j’ai écrit le récit de mon accouchement sans jamais le partager. Ces derniers jours j’ai eu envie de me replonger dedans. Et ça m’a fait du bien.
Et je me dis que parfois, les histoires d’autres femmes nous aident à relire les nôtres, donc voici mon récit.
Le « jour d’avant »
Mardi. Premier jour en Bélier, nouvelle lune. Je suis à peu de chose près au même terme que pour mon aîné.
Il est 22h quand les premières contractions arrivent. Elles sont légères, assez espacées, mais je reconnais immédiatement la sensation.
On m’avait dit que pour le deuxième ça pouvait aller très vite. Je décide donc d’appeler mon amie July pour venir à la maison et garder notre fils, au cas où.
Vers 2h, les contractions ont lieu toutes les 10 minutes. Elles ne sont pas trop fortes, ni très rapprochées. Je sais qu’il faudrait attendre qu’elles soient toutes les 5 minutes… je sais mais j’ai peur que tout s’accélère d’un coup. Je ne pense meme pas à prendre un spasfon ou un bain.
J’ai peur de ne pas avoir le temps d’arriver à la maternité. C’est en boucle dans ma tête. Et avec la grève des éboueurs à Paris, je me dis que la route sera peut-être bloquée. Bref, dans ma tête je me fais un film catastrophe à base de jsuis bloquée dans le taxi j’accouche comment 😂 ?!
Donc on décide d’y aller. Arrivés là-bas on m’examine : je suis à 1. Bon déjà ça sent pas bon 😂. On m’installe en salle de naissance avec un ballon.
Je passe la nuit à essayer d’aider mon corps à s’ouvrir. Ballon, marche … mais je commence à être épuisée. Entre les contractions je m’allonge et à chaque fois que je me recouche pour me reposer, les contractions ralentissent. Mais j’y crois 💪🏽 je repars avec mon ballon. Tours de bassin. Respiration on y retourne.
À 7h, on me réexamine : le col n’a pas bougé. Douche froide.
J’ai l’impression d’avoir passé une nuit blanche pour « rien ». La sage-femme me rassure en me disant que quand même le «pré-travail » (parce que finalement c’est de ça qu’il s’agit) présage que c’est pour bientôt.
On nous renvoie à la maison. Fatigués, un peu déçus forcément, mais avec l’intuition que ce n’est que le début…
« Ça recommence »
Mercredi. Après le faux départ de la veille, je passe la journée à me reposer.
La sage-femme m’a dit que ce “pré-travail”, même s’il est frustrant, annonçait sûrement un accouchement proche. Alors je me repose, je fais ma skincare de la tête aux pieds, je m’occupe.
Les contractions sont encore là, mais légères, espacées. Par précaution, je demande à July de revenir dormir à la maison.
Il est 22h quand les contractions reprennent.
Toujours espacées, mais un peu plus intenses. On regarde une série, on discute, je fais un peu de ballon, puis tout le monde va se coucher. Je me couche aussi… mais cette fois, les contractions ne ralentissent pas. Je commence à les chronométrer : toujours toutes les 10 minutes, mais elles deviennent plus fortes.
Une heure du matin
Les contractions sont puissantes. Une sur trois me coupe le souffle.
Je n’ai pas de méthode miracle mais je repense à l’hypnose. Je souffle, je bouge, j’essaie surtout de ne pas me crisper. Et étonnamment (team control freak 🤣) : j’y arrive pas trop mal. J’accueille les contractions.
J’ai ma playlist “accouchement” dans les oreilles.
Je me laisse traverser par la musique, les sensations.
Je rentre dans un truc un peu animal, dans le noir de la chambre. Mon bassin bouge tout seul. Je commence à douiller sévère 😂 mais hors de question de retourner à la mater « pour rien ». Donc je tiens. Je me sens hyper connectée.
Et puis… Vers 2h15, sur « feel » de Robbie Williams (ça s’invente pas mdr), une contraction me PLIE en deux 🥲
Elle dure plus d’1 min. (c’est long 1 min…). Et pof, je sens un liquide chaud qui s’écoule. J’ai perdu les eaux !!
Moi qui pensais que ça ne m’arriverait pas (je n’avais pas perdu les eaux pour mon ainé), me voilà debout en train de paniquer total « faut y aller !! »
Je claque des dents. D’un coup, tout devient concret. J’ai toujours eu peur de perdre les eaux. Parce que je sais ce que ça veut dire : ça veut dire que ça s’intensifie. Et j’ai peur. Du rythme. De la douleur. De l’accouchement dans le taxi (#drama)
Ça fait déjà 6h que je gère des contractions de + en + intenses, alors si ça monte encore d’un cran… pfiouuuu 🥵🥵
Lets go
Y’a un petit vent de panique dans le salon, tout le monde s’affaire : prendre les sacs, commander le taxi, enfiler un jogging (et à 9 mois de grossesse enfiler un jogging tout en gérant des contractions je vous laisse imaginer comme c’est simple et rapide 😂)
Le taxi est en bas. On y va
Il est 2h30. Le chauffeur est adorable.
Fun fact : sa fille est, au même moment, en train d’accoucher dans une autre maternité ! Il va devenir grand-père pour la première fois
Moi, j’essaye de tenir. Je serre littéralement les jambes. Je le sens dans mon corps. Qu’il faut que je serre, retienne. Contrairement aux contractions où j’étais dans le lâcher-prise, là j’essaye de crisper de toutes mes forces. Et les contractions sont costauds
22 minutes plus tard, on arrive à la maternité.
Et là… la porte est coincée. On est devant, je m’appuie sur le mur, en pleine contraction « ouvreeeeez 🫨» … et la porte est coincée, comme dans les films 🤣
Le gardien finit par ouvrir après ce qui me semble être une éternité. Ouf. On connaît le chemin. On avance vers les salles de naissance, on rencontre une sage-femme adorable. Elle m’examine : “Vous êtes à 3.” Mes sensations sont décuplées. Je claque des dents. J’ai froid, je tremble, je suis tendue, aux aguets.
L’anesthésiste est au bout du couloir, on me le dit tout de suite. Ça me soulage de savoir qu’il va s’occuper de moi. Je sais pas pourquoi mais j’ai toujours eu peur d’accoucher sans péridurale… Et mon projet de naissance est clair : AVEC péridurale 🤣
Il arrive, il m’explique tout calmement. Je m’accroche à sa voix. Quinze minutes plus tard, la péridurale est posée. On me dit que je peux me reposer. Donc je m’allonge sur le côté et pour la première fois depuis que j’ai perdu les eaux dans la pénombre de ma chambre : je me relâche
Cinq minutes passent.
Puis je sens une pression dans mon bassin. Panique. Je regarde Jean et je lui dis «faut qu’on rappelle la sage-femme »
Elle revient. M’examine. “Madame, vous êtes à 9.”
Il aura fallu dix minutes. Pour passer de 3 à 9.
En me relâchant quelques minutes auparavant, j’avais laissé mon corps faire de la place à mon bébé pour passer
Il arrive
L’anesthésiste revient. La péridurale n’a pas eu le temps d’agir. Il me propose de renforcer la dose.
“Mais si je vous l’administre, vous ne pourrez plus bouger vos jambes »
Pas besoin de mes jambes là, je sens que mon bélier de fils est prêt à arriver 🤣 et moi, je suis toujours bloquée sur mon projet d’accouchement « avec péridurale ». Donc j’accepte.
Mon gynéco arrive. Tout le monde s’installe calmement autour de moi. Jean me tient la main. La pièce est tamisée, tout le monde chuchote, tout le monde est zen, y’a que moi qui panique 🫠.
La pédiatre entre, et me demande doucement : “Vous souhaitez faire du peau à peau directement après la naissance ? »
La question me semble irréelle. Pour moi c’est comme si elle m’avait dit « vous prendrez un café après le dessert? » 😂
Dans ma tête y’a un monde entre le moment présent et le moment où mon bébé sera la. Mais la question de la pédiatre me ramène à la réalité. Il arrive. 9 mois de grossesse, les vomissements du premier trimestre, les 25 kilos en +, la pubalgie, la fatigue… On y est . Il arrive.
Et bien sûr qu’on va faire du peau à peau 🥹. Mon gynéco me guide pour pousser. Je sens encore les contractions. La péridurale n’a pas eu le temps de faire effet complètement.
Mais là je suis dans l’instant. Je ne pense plus à rien.
Je pousse.
Une première fois. Une deuxième. Ce n’est pas assez. Je n’arrive pas à trouver la bonne intensité. J’ai perdu certaines sensations. Et je commence à douter. « je vais jamais y arriver 😭 »
Jean me tient la main, m’encourage. Et mon gynéco me regarde avec un calme olympien “Tu sais, Karine… bien sûr que tu vas y arriver. Dans quelques instants, votre fils sera là.”
Contraction suivante. Je pousse
«Allez plus fort !! »
« Plus fort, plus fort ! »
Je pousse de toutes mes forces.
Et mon fils sort.
Je sens son passage. Et c’est vraiment incroyable. Un bouleversement, une sensation comme aucune autre 🥹.
Jean l’attrape avec le gynéco.
Deux secondes plus tard, mon fils est contre moi.
Et là… plus rien n’existe. Plus de salle. Plus de monde autour. Juste nous.
Les jours d’après
Je ne sais plus combien de temps on est restés dans cette salle. Je n’ai aucun souvenir précis de la sortie du placenta, ni des points, des minutes qui ont suivi…
Dali était arrivé, et c’était tout ce qui comptait. Puis on nous a montés en chambre.
C’était le matin, et je me souviens comme c’était fou de démarrer une nouvelle journée avec un nouveau membre dans notre famille.
Comme un nouveau départ.
On passait notre temps à le regarder dans son berceau. Si petit. On oublie quand on a déjà un enfant, plus grand. À quel point c’est petit, un nouveau-né
Et puis il y a eu la rencontre entre les 2 frères. Les parents de plusieurs enfants… vous SAVEZ. Ce moment complètement magique ✨
Corto avait choisi un doudou pour son frère, qu’il a déposé près de lui. Et on avait préparé pour lui une « boîte à grand frère » avec des cadeaux « de la part du bébé ». 2 ans plus tard il s’en souvient toujours 🥹.
De mon côté je me suis retrouvée dans mon corps en post-partum immédiat : tranchées, lochies, douleurs au niveau des points, montée de lait et autres joyeusetés 🤣🫠
Mais le fait de vivre ça en « sachant », avec le souvenir de ma première fois et du fait que « tout passe », m’a fait énormément de bien ❤️🩹.
J’ai pris les moments comme ils venaient, un par un. J’ai aimé ces 5 jours à la maternité. Coupée du monde.
Bon y’a eu des petites péripéties : la jaunisse avec un taux qui ne baissait pas, qui fait que le lendemain de la sortie j’ai du revenir dormir à la mater pendant que Dali était sous la lampe… Puis quelques jours plus tard une mini frayeur où on a cru qu’il faisait de la fièvre et où j’ai du passer 24h aux urgences pédiatriques pour surveillance avec lui
Mais après ça on est rentrés « pour de bon » et on a pu démarrer notre vie à 4 dans la vraie vie … ❤️
